Patrice Talon et son équipe ont commandité des audits dans les sociétés d’Etat et plusieurs structures de l’administration publique. Mais jamais ils n’ont publié les résultats catastrophiques de ces contrôles….

Bonne gouvernance et lutte contre la corruption : Où sont les audits réalisés sous la Rupture?

Bonne gouvernance et lutte contre la corruption : Où sont les audits réalisés sous la Rupture?

Patrice Talon et son équipe ont commandité des audits dans les sociétés d’Etat et plusieurs structures de l’administration publique. Mais jamais ils n’ont publié les résultats catastrophiques de ces contrôles. Le Chef de l’Etat a préféré en faire une arme de chantage.  

Le Bénin va mal. Les sociétés d’Etat surtout. Le président Patrice Talon  en est conscient. Au début de son mandat, il a d’ailleurs demandé des audits dans plusieurs ministères, sociétés d’Etat et même au Parlement, notamment le dossier relatif à la construction du nouveau siège de l’Assemblée nationale. Plusieurs ministres avaient soutenu que l’état des lieux montrait une situation catastrophique. On a pu dénoncer des dossiers de corruption et des détournements de deniers publics. Des noms d’anciens ministres et même des députés ont été cités dans de nombreux dossiers. Mais le gouvernement s’est gardé de publier les résultats des audits réalisés à coups de millions de F Cfa. En novembre 2016, le ministre de la Justice, Joseph Djogbénou indiquait que le gouvernement avait renoncé à la publication des résultats d’audits commandités dans les Sociétés et offices d’Etat « au profit de leur transmission à la Justice aux fins d’en tirer les conséquences idoines et en faire l’exploitation la plus judicieuse». Seulement à l’époque, l’OngAlcrer faisant référence à la Déclaration de Mexico qui recommande aux Etats d’œuvrer à la publication et à la diffusion des résultats des audits, avait demandé au gouvernement de la Rupture de « garantir le droit à l’information des citoyens béninois ». L’Ong avait aussi invité la Justice, à « procéder sans délai à la publication de la liste des dossiers soumis à son attention par le gouvernement depuis son avènement au pouvoir le 06 avril 2016». Mais depuis, presque rien n’a bougé. A part le dossier relatif à la gestion de la filière des véhicules d’occasion, le gouvernement a montré une volonté manifeste de ne pas faire la lumière sur les nombreux dossiers de corruption auxquels sont mêlés des barons du régime du Changement. Il n’y a vraisemblablement pas de rupture dans la gouvernance publique au Bénin alors qu’on avait promis de grands bouleversements aux électeurs en 2016. Au contraire, le gouvernement a préféré, selon des sources concordantes, faire des résultats des audits une arme de chantage. Les anciens collaborateurs de Yayi Boni qui ont aux plans politique et/ou économique une influence non négligeable et qui ont des casseroles sont souvent menacés par le pouvoir. Soit, ils coopèrent avec le gouvernement actuel, soit ils sont jetés en prison. C’est bien le cas des acteurs politiques qui retournent leurs vestes depuis quelques temps. Plusieurs députés  membres des Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe) fidèles de Yayi Boni  sont contraints de défendre la Rupture.On a l’impression que Patrice Talon et son équipe ont choisi de sacrifier l’intérêt général : la lutte acharnée contre la corruption.

L’alerte de l’Ue ?

L’état de la gouvernance publique au Bénin préoccupe les citoyens. Mais également certains grands partenaires. Le 9 mai dernier,  lors de la fête de l’Europe à Cotonou, le Chef de la délégation de l’Union européenne (Ue) au Bénin a fait un commentaire qui doit interpeller les hauts responsables de l’Etat. « La volonté conjointe du gouvernement et des forces politiques et sociales qui le soutiennent dans l’effort d’amélioration de la gouvernance politique et économique, ne doit pas  fléchir devant certaines résistances au changement qui nous paraissent difficilement  compréhensibles, voire justifiables», a déclaré l’ambassadeur Josep Coll. Il ajoutera : « Dans un monde en évolution et très compétitif, faire valoir certains privilèges ou positions est vain et malvenu». Sans dénoncer un mauvais choix de l’Exécutif, ces propos soulignent l’obligation pour le Bénin de renforcer la bataille contre la corruption. On remarque en effet une renonciation tacite dans les actes des responsables politiques. Josep Coll a semblé bien relever ce constat.Le Bénin estdonc très bien suivi par ses partenaires. La gouvernance publique devrait influencer davantage les futurs partenariats avec les soutiens financiers. C’est dire que si la Rupture n’attaque pas fondamentalement la corruption, ce fléau qui gangrène l’économie nationale, le Bénin pourrait souffrir de l’aide de ses partenaires sérieux.

M.M