Le président de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet), Edouard Cyriaque Dossa, met devant leurs responsabilités les accusés, sachants et témoins de l’affaire Icc-Services. Il…

Procès Icc-Services: L’appel à la vérité du président de la Criet

Procès Icc-Services: L’appel à la vérité du président de la Criet

Le président de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet), Edouard Cyriaque Dossa, met devant leurs responsabilités les accusés, sachants et témoins de l’affaire Icc-Services. Il attire leur attention sur le sens d’un procès et la nécessité pour les différentes parties de dire la vérité et rien que la vérité afin de permettre au juge de dire le droit. Il a lancé cet appel lors de l’audience du lundi 31 décembre dernier.

Le président de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet), Edouard Cyriaque Dossa, est visiblement agacé par le comportement des accusés, sachants et témoins du procès Icc-Services. Ils semblent égarer la cour en faisant économie de vérité. Cette situation risque de voir l’audience criminelle prendre du temps. Edouard Cyriaque Dossa a levé le ton à l’entame de l’audience du lundi 31 décembre dernier pour mettre chacune des parties au procès devant ses responsabilités.
Selon le président de la cour de céans, un procès a toujours pour vocation de revenir sur une histoire qui s’est mal terminée entre deux ou plusieurs personnes. Le procès ramène les différentes parties litigantes sur les moments où les divergences sont nées entre elles; les bons temps qui ont précédé celles-ci; les circonstances de leur survenue; ceux qui ont été de mauvaise foi dans les agissements incriminés. Ainsi, les premières personnes qui doivent permettre au juge de dire le droit, afin que les responsabilités soient situées, sont en principe, les parties au procès, insiste Edouard Cyriaque Dossa. Défaut pris d’elles, le juge se tourne vers les témoins visuels ou auditifs, voire ceux qui ont accès aux informations non encore dénaturées et qu’on qualifie de sachants. « Plus celles-là (les parties) choisissent de cacher ce qu’elles ont fait, plus ceux-ci, les témoins et sachants, décident de ne pas restituer à la cour ce qu’ils savent réellement des faits en cause, plus le procès prendra du temps pour s’étaler dans le temps», avertit le président de la Criet. Dans ce cas, la cour n’aura d’autre moyen, au regard de l’âge du litige qui a déjà fait huit ans alors que le corps du délit notamment les sommes d’argent récupérées par voie de dépôt par les accusés, les instruments pouvant retracer l’usage qui en a été fait, les biens meubles et immeubles acquis, les ordinateurs à même de renseigner la cour, n’est encore intégré puisque dévoré à dessein ou non par le temps et surtout les diverses forces agissantes afin de voir ou non aboutir le procès. Ce qu’il faut éviter à tout prix, insiste encore Edouard Cyriaque Dossa, c’est de voir ce procès définitivement consumer dans la flamme du mensonge, le piège du temps, les pressions inciviques sur ceux qui ont accepté d’animer ce segment processuel y afférent.

Le procès s’enlise

Cela est d’autant inquiétant, car beaucoup attendent l’issue de ce procès, informe-t-il. Il s’agit d’abord, selon lui, du peuple béninois qui attend de savoir si le phénomène Icc-Services relève d’une déviance à réprimer ou d’une tolérance mal encadrée. Ensuite, les accusés ont droit, par voie de conventions supranationales, de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et de la Constitution du 11 décembre 1990, à une justice dans un délai raisonnable. Le président de la Criet observe que la raisonnabilité de cette justice dépend plus des témoins et sachants que des circonstances ayant entouré les faits et de celles entravant actuellement le procès. Autres catégories de personnes qui espèrent beaucoup du procès criminel en cours, ce sont les victimes. Celles qui ne sont plus de ce monde, laissant veuves, veufs, orphelins en effectif élevé et sans cesse croissant, poignardés mortellement par la douleur générée par le phénomène Icc-Services et consorts. Edouard Cyriaque Dossa ajoute à la liste de ces victimes celles qui vivent, mais très malades et qui attendent plus la mort venir les chercher que la consolation qu’elles tireront de ce procès, quelle qu’en soit l’issue. Il y a de même ceux qui sont invalidés depuis l’éclatement de cette affaire en 2010 et les victimes silencieuses qui préfèrent voir partir des millions qu’elles ont déposés à Icc-Services et consorts que de voir citer leurs noms, prenant, si tel ne venait pas en être le cas, le risque de subir des peines disciplinaires. « C’est dire combien de fois ce procès est tant attendu, surtout dans sa phase d’achèvement », laisse entendre Edouard Cyriaque Dossa. Toutefois, il reste déterminé pour la poursuite du procès dans l’espoir de ne moissonner la vérité et rien que la vérité. Le ministère public, les avocats de la défense et de la partie civile n’ont rien trouvé à dire sur cette observation du président de la cour qui a l’allure d’un rappel à l’ordre musclé.
Le décor de l’audience du lundi dernier étant ainsi planté, Edouard Cyriaque Dossa a invité à la barre Pépin Adjovi, ex-commissaire central de la Police nationale et ancien directeur départemental de la Police nationale par intérim de l’Ouémé-Plateau et Dieudonné Dadjo Lissagbé, ex-commandant de la Brigade économique et financière (Bef) au moment des faits. La cour a poursuivi avec les deux témoins l’instruction de l’affaire relativement surtout aux conditions dans lesquelles les différentes perquisitions ont été opérées au domicile de l’accusé Emile Tégbénou à Adjarra et les fruits de ces descentes, notamment la situation autour des soi-disant 27 milliards F Cfa qui seraient laissés dans un coffre-fort et dont le montant varie d’un déposant à un autre. Les circonstances de l’octroi de garde du corps et des permis de port d’arme à Emile Tégbénou ont été décortiquées par la cour avec l’aide de l’avocat général, Ulrich Gilbert Togbonon, et les avocats des accusés dont Me Hervé Gbaguidi, les avocats du collectif des victimes, Mes Gustave Anani Kassa et Alain Orounla ainsi que les conseils de l’Etat béninois assurés par Mes Olga Anassidé et Spéro Quenum. Seulement, il n’y a pas encore grand-chose à se mettre sous la dent tant les accusés et les témoins varient dans leurs propos. Même les confrontations effectuées par la cour de temps à autre entre les deux témoins du jour et les accusés Guy Akplogan et Emile Tégbénou ne lui ont pas pour autant permis de découvrir la vérité. C’est dans ces conditions d’enlisement des débats que le procès a été suspendu pour reprendre demain jeudi 3 janvier à la Criet.