C’est désormais une question d’agenda et de réglages techniques pour voir atterrir au Bénin une bonne partie des trésors culturels longtemps détenus par la France. Avec le vote par le…

Restitution des trésors culturels par la France :Le Bénin maintient son agenda

Restitution des trésors culturels par la France :Le Bénin maintient son agenda

C’est désormais une question d’agenda et de réglages techniques pour voir atterrir au Bénin une bonne partie des trésors culturels longtemps détenus par la France. Avec le vote par le Parlement français de la loi portant restitution au Bénin et au Sénégal des biens culturels déportés en France à l’époque coloniale au titre de « butins de guerre », ce projet du Bénin connait désormais un coup d’accélérateur.

Mardi 6 octobre dernier, le Parlement français a voté à l’unanimité la loi portant restitution au Bénin et au Sénégal des biens culturels amenés en France à l’époque coloniale au titre de « butins de guerre». Le texte de loi a été adopté par 49 voix pour et zéro contre et attend d’être examiné par le Sénat. Cette étape franchie, il restera à effectuer quelques travaux techniques pour passer à la concrétisation du projet. Cette restitution s’inscrit dans le cadre d’une « volonté renforcée de coopération » avec le Bénin et le Sénégal, selon le ministre français du Commerce extérieur, Franck Riester, précédemment ministre de la Culture, venu défendre le texte à l’hémicycle à la place de la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, en isolement dû à la Covid-19.
Tout est parti du discours du président français Emmanuel Macron, mardi 28 novembre 2017 à l’Université de Ouagadougou. Il voulait alors «écrire une nouvelle relation d’amitié dans la durée au-delà des menaces, des craintes et de nos intérêts partagés ». Au titre des trois clés offertes par le président français, la culture. «Je ne peux pas accepter qu’une large part du patrimoine culturel de plusieurs pays africains soit en France. Il y a des explications historiques à cela mais il n’y a pas de justification valable, durable et inconditionnelle, le patrimoine africain ne peut pas être uniquement dans des collections privées et des musées européens. Le patrimoine africain doit être mis en valeur à Paris mais aussi à Dakar, à Lagos, à Cotonou, ce sera une de mes priorités », avait lâché Macron devant des centaines de jeunes Burkinabè surexcités. Discours politique ? Certainement pas. Les faits donneront ensuite raison au chef de l’Etat français qui aura démontré sur toute la ligne, sa volonté de faire aboutir un tel projet. « La culture c’est aussi ce qui doit permettre de changer les regards que nous portons l’un sur l’autre et c’est avec cette ambition que j’ai décidé de lancer… Le meilleur hommage à rendre à ces artistes qui se sont battus pour sauvegarder ces œuvres c’est de tout faire pour qu’elles reviennent», soulignait-il.

Le Bénin s’apprête

Avec la série de diligences du côté français, beaucoup se sont posé la question de savoir si les Béninois sont prêts pour le retour de ces objets. Curieusement, avec le vote de la loi par le Parlement français, le sujet est revenu sur le tapis. Sauf que la réponse ne varie pas. Alain Godonou, directeur du programme Musée à l’Agence nationale de promotion des patrimoines et de développement du tourisme (Anpt) est formel. « Il y a encore tout un processus. Il y a encore un travail technique à faire, admet-il. Le «monsieur patrimoine du Bénin» comme on se plait à l’appeler soutient d’ailleurs que « les Français connaissent notre agenda et nous connaissons aussi le leur. Nous nous sommes entendus sur cet agenda ». Pour lui, tout tient encore dans le temps imparti. En plus il était nécessaire « de mettre à niveau les infrastructures pour accueillir les collections ».
Alain Godonou pense que si les balises ne sont pas bien posées, on pourrait faire face à des situations regrettables. D’ailleurs, rappelle-t-il, l’Afrique n’est pas à sa première expérience du genre, soutient-il. « L’Afrique n’est pas à son premier épisode de réclamation-restitution. La Belgique a restitué des objets au Zaïre du président Mobutu qui avait fait une démarche similaire à celle du président Patrice Talon. Mais les objets retournés dans l’ex-Zaïre ont disparu pour se retrouver après sur le marché des trafiquants parce que le pays n’était pas préparé », fait-il observer. L’impréparation concerne aussi bien les infrastructures que les mentalités. « Nous ne voulons pas qu’il en soit ainsi pour le Bénin, qu’on nous retourne les objets et que pour des questions de sécurité, de lieux mal gardés, des voyous les accaparent et les font disparaitre dans la nature», révèle l’expert. « C’est une responsabilité que le pays assume. C’est normal de se préparer, de créer les conditions pour que les choses se passent correctement», indique le directeur du programme Musée à l’Anpt.

Pas de complexe

« La justesse de la cause de notre pays et le pragmatisme de Macron laissent entrevoir une issue favorable. On peut donc espérer que dans un futur pas très lointain, nous pouvons admirer dans les galeries des musées béninoises les trônes, récades et bien d’autres merveilles…». Comme des milliers d’autres Béninois, Christian Abouta, évaluateur des politiques publiques, compte les jours. Plus qu’une question de temps, pour que les 26 œuvres retenues pour être restituées au Bénin signent leur grand retour. Mais en amont, il y a du travail. L’agenda du Bénin sur ce chantier est connu. En visite à Cotonou, l’ancien ministre français de la Culture avait annoncé la restitution pour 2021, le temps que tout se mette en place. Il y a quelques jours, saluant le vote par le Parlement français de la loi y relative comme « une grande victoire pour la coopération internationale », Alain Godonou s’est voulu un peu plus précis. « Nous allons accueillir ces objets dans un délai d’un an environ parce qu’après ce vote… Il y a encore un travail technique à faire », assure-t-il. Une fois retournés, ces trésors culturels seront accueillis au musée en chantier au niveau du Fort français de Ouidah dans un premier temps avant d’être convoyés vers leur destination finale, le musée de l’épopée des Amazones et des rois du Danhomè à Abomey, indiquent d’autres sources fiables.
En dehors du travail technique, le Bénin attend surtout de résoudre son problème de déficit d’infrastructures. « Nous n’avons pas de complexe par rapport à cela», tranche le directeur du programme Musée à l’Anpt. Selon lui, l’état des infrastructures muséales dans le pays était préoccupant et le gouvernement est en train d’investir massivement pour leurs réalisation et réhabilisation. L’ambition du Bénin, selon ses explications, va au-delà de cette seule et simple restitution. Le Bénin veut désormais figurer parmi les pays qui comptent quand on parle de ces questions et « au-delà des œuvres qui seront restituées, nous pouvons accueillir désormais toutes sortes de collections et d’expositions de niveau mondial ».

Liste des œuvres

Statue anthropomorphe du roi Ghézo,
Statue anthropomorphe du roi Glèlè,
Statue anthropomorphe du roi Béhanzin ;
Porte du palais royal d’Abomey ;
Porte du palais royal d’Abomey ;
Porte du palais royal d’Abomey ;
Porte du palais royal d’Abomey ;
Siège royal ;
Récade réservée aux soldats masculins du bataillon blu, composé uniquement d’étrangers
Autel portatif
Autel portatif du roi Béhanzin ;
Autel portatif du palais royal incomplet ;
Autel portatif du palais royal incomplet ;
Trône du roi Glèlè ;
Trône du roi Ghézo (longtemps dit « Trône du roi Béhanzin ») ;
Autel portatif à la panthère, ancêtre des familles royales de
Porto-Novo, d’Allada et d’Abomey;
Fuseau ;
Métier à tisser ;
Pantalon de soldat ;
Siège tripode kataklè sur lequel le roi posait ses pieds ;
Tunique ;
Récade réservée aux soldats masculins du bataillon blu, composé uniquement d’étrangers ;
Récade réservée aux soldats masculins du bataillon blu, composé uniquement d’étrangers ;
Autel portatif du palais royal incomplet ;
Sac en cuir