Confrontée actuellement à une crise dont elle a le secret, la Renaissance du Bénin (RB) est appelée à connaitre encore des jours tumultueux, vu que les protagonistes n’entendent, selon toute évidence, pas sceller la paix des braves, à en juger par les derniers développements de la situation.
Le dialogue de sourds, ou pour être précis, la guerre psychologique par médias interposés, continue au sein de la RB. Depuis la déchéance de Lehady Soglo es qualité président de la Renaissance du Bénin, chose que le mis en cause conteste, les sympathisants de ce parti et l’opinion nationale toute entière avec, assistent au remake d’un feuilleton familier à cette formation politique.
La crise vient de prendre une tournure nouvelle, et sérieuse, avec l’exclusion d’un fort contingent de membres du parti par le président déchu. Une véritable saignée. On n’est pas loin de la lutte finale.
Après l’épique guerre du logo que Nahanaël Bah, vice-président de la RB a mené en 2001 contre Rosine Soglo alors présidente qu’il a par ailleurs tenté de renverser, après l’épisode de la tentative par des barons d’en prendre le leadership, voilà le parti dont l’ancien chef d’Etat Nicéphore Soglo est le président d’honneur à nouveau dans la mélasse.
Depuis le 21 mai dernier en effet, date à laquelle le bureau politique a tenu une réunion extraordinaire, sans son président, déchu au terme de ladite réunion, le destin de la RB a pris à nouveau un détour tumultueux. Au président « déchu » qui conteste la légalité de la réunion et des actes subséquents, ceux que Lehady Soglo appelle « les frondeurs » opposent leur légitimité à agir en raison de préjudices graves causés au parti par ce dernier. Sa déchéance serait, à les croire, donc un acte salvateur pour la survie dudit parti.
Mentors de la RB, Nicéphore Soglo et Rosine Vieyra Soglo ont clairement pris fait et cause pour Lehady Soglo qui garde toute légitimité à être président du parti, ont-ils martelé. Ceux-ci, très amers contre lesdits frondeurs, n’ont pas pris de gangs pour leur signifier combien leurs voix comptent pour des broutilles, manquant à peine de proférer des noms d’oiseau à leur sujet! Loin de surprendre, « Je ne m’attendais pas à ce que le père et la mère disent autre chose que soutenir leur fils », ironise Georges Bada désigné président intérimaire par ses pairs, cette position adoptée par Nicéphore Soglo et Rosine Vieyra Soglo, cristalise davantage les clivages.
De go, les deux ailes, se disant toutes légitimes, projettent un congrès, non pas, on s’en doute, à la même date. Ni pour les mêmes raisons.
Lehady Soglo va sans doute en congrès, dans la perspective d’entériner sa thèse selon laquelle seul ledit congrès peut démettre le président du parti et ainsi conforter son leadership. Ses vis-à-vis, eux entendant par l’organisation d’un congès, le leur ?, s’auréoler ainsi de la légitimité qui leur est déniée, après avoir franchi un pas dans ce sens suite à l’accusé de réception par le ministère de l’Intérieur de leur lettre portant ‘’transmission de notification des déclarations du bureau politique national du parti’’.
Cependant, dans une interview qu’il a accordée à Jeune Afrique, Lehady Soglo accuse, à mots à peine voilés le pouvoir en place, d’être la main invisible qui a activé la crise au sein de la RB, et les dissidents d’être ses marionnettes. Quelle sera l’issue de ce feuilleton qui ne vient que de commencer si l’on en juge par les prises de position de plus en plus crispées?
Purge fatale ?
Les membres de la RB entrés en dissidence, ne sont pas des moindres dans un parti qui, au fil des années, s’est vidé de son personnel politique, en l’occurrence les cadres. Abraham Zinzindohoué pourtant réputé pour sa modération est de l’équipée des dissidents, ce qui n’est pas anodin, ainsi que Georges Bada, Luc Atrokpo. Ces deux derniers étant des maires de villes importantes, respectivement Abomey-Calavi et Bohicon. Quant au député Adolphe Djiman, il n’est pas des moindres dans la galaxie Soglo, pour avoir occupé le poste important de directeur des affaires financières à la mairie de Cotonou avant de siéger à l’Assemblée nationale pour la première fois suite aux dernières législatives.
Habitués à ce genre de confrontation, à savoir l’entrée en dissidence de membres du parti, depuis sa création, les fondateurs et piliers de la Renaissance du Bénin que sont Nicéphore Soglo et Rosine Vieyra Soglo, peuvent se targuer d’en avoir vu d’autres. Non seulement, les dissidents, quels qu’ils soient n’ont jamais réussi à prendre la clé du parti, aussi ont-ils vu leurs carrières politiques s’éteindre. Il en a été ainsi des anciens barons tels que Maxime Houédjissin, Georges Guédou, Guy Adjanohoun, etc. Plus jamais ils n’ont réussi à décrocher le moindre mandat électif, eux qui étaient députés et jouaient les premiers rôles sur l’échiquier politique national. Il ne fait donc pas bien vivre pour la biche de « se fâcher avec la rivière », selon l’anthologique boutade de Nicéphore Soglo, signifiant malheur à qui lui tourne dos.
Leader charismatique du parti, ce dernier l’irradie de son aura, grande. Tant et si bien qu’il faut craindre que la RB ne survive à son absence sur l’équipier politique, lui qui à chaque échéance électorale prend son bâton de pèlerin, allant tant que son âge le lui permettait par monts et par vaux, pour battre campagne au profit des candidats de la bannière RB. Son ascendance est donc totale, et de par sa stature d’ancien président de la République, sa voix porte dans les régions qui sont depuis 25 ans restées ses fiefs politiques. Difficile par conséquent de remporter la moindre élection dans ses bastions en étant opposé à Nicéphore Soglo. Les dissidents actuels subiront-ils, en considération de cette réalité, le même sort que leurs illustres prédécesseurs?
Cette problématique est le nœud de la crise, car les attributs d’un parti aussi bien enraciné dans le landernau politique comme la RB sont déterminants. Ce n’est pas pour rien, qu’à la suite de «Maman », Léhady Soglo exhorte, pince-sans-rire, lesdits dissidents à éller « créer leur propre parti » ! Les attributs, ce sont le logo, les ressources éventuelles, le capital électoral à travers les cellules de base, la renommée… Aussi, les protagonistes, tous avertis de cela, se battront bec et ongle pour l’emporter. Il y va de leur avenir, de part et d’autre. Inutile donc d’être devin, de savoir lire dans un marc de café ou le foie d’un pigeon, pour savoir que la bataille sera rude.