Au cours de la sortie médiatique des anciens présidents de l’Assemblée nationale, il les avait désignés comme les seuls responsables de l’impasse politique. C’est dans Jeuneafrique n°3047 du 2 au 8 juin 2019 en sa page 33 qu’on saura un peu plus sur les griefs de Bruno Amoussou à l’encontre des anciens présidents Nicéphore Soglo et Boni Yayi. Pour Bruno Amoussou, un consensus était trouvé avec la minorité parlementaire dans le cadre des législatives d’avril 2019. Mais il a fallu que les deux anciens présidents entrent en jeu pour que la minorité remette tout en cause, d’où le blocage. Et d’ajouter que l’opposition n’a pas compris qu’en réalité Nicéphore Soglo et Boni Yayi avaient un contentieux particulier, personnel, familial ou autre avec l’actuel chef de l’Etat. Dans Jeuneafrique de cette semaine, il lève un coin de voile sur ce prétendu contentieux particulier. Selon Bruno Amoussou, Nicéphore Soglo ne veut autre chose que le retour de son fils au bercail et Boni Yayi veut reconquérir un pouvoir perdu. Il en déduit que pour que l’opposition ait gain de cause, soit les anciens présidents renoncent à leurs intérêts personnels, soit les autres membres de l’opposition s’éloignent d’eux.
Dit ainsi, on comprend à peu près l’origine des relations difficiles entre Patrice Talon et ses prédécesseurs. Même s’il se défend d’être un conseiller occulte du chef de l’Etat, Bruno Amoussou, fait partie des rares personnes que Patrice Talon consulte. Et quand on sait que durant toute sa carrière politique, Bruno Amoussou n’a jamais vraiment eu de bons rapports avec l’un et l’autre des anciens présidents, il ne faut se faire aucune illusion. Ce n’est pas pour demain l’image d’un président en exercice en harmonie avec ses prédécesseurs que souhaitent voir les Béninois, comme c’est le cas ailleurs.
D’abord avec Nicéphore Soglo (1991-1996), Bruno Amoussou était l’un des artisans de l’opposition d’alors qui a œuvré pour l’échec à la présidentielle du 1er président du renouveau démocratique. Elu président de l’Assemblée nationale en 1995, avec certes la bénédiction de Soglo qui voulait se débarrasser d’Adrien Houngbédji, l’homme, une fois installé au perchoir s’est retourné contre le régime Soglo. Il a tout fait pour mettre en difficulté le président Soglo. Le poste de 2e personnalité de l’Etat lui donnait une certaine notoriété. Il était perçu comme le seul capable de défaire les contre-vérités du pouvoir. Et il s’en est servi lors de la campagne présidentielle de 1996. Quand Soglo allait quelque-part dans la matinée, Amoussou s’y rendait dans l’après-midi pour « détruire » tout ce que Soglo avait dit. Résultat, Nicéphore Soglo n’a pu se faire réélire.
Boni Yayi non plus n’a jamais eu de bonnes relations avec le « renard de Djakotomey ». Les dix ans de Boni Yayi ont été pour lui une longue traversée du désert. En 2011, il a réussi à réunir tous les ténors de l’opposition, y compris la Rb de Soglo et le Prd de Houngbédji, dans un grand ensemble (l’Un). Mais le K.O de Boni Yayi au premier tour a fait voler en éclats cette Union. Comme ce fut le cas avec l’Ubf, Bruno Amoussou s’est, une fois encore, retrouvé seul avec « une coquille vide ». Aujourd’hui, avec Patrice Talon, il tient le grand ensemble (Up) dont il a toujours rêvé. Une bonne relation entre Patrice Talon et ses prédécesseurs risque de remettre en cause cet idéal politique qu’il a toujours voulu. Et ça, Amoussou ne peut accepter. En même temps, c’est l’ultime occasion qu’il a de régler ses comptes politiques. Malgré les différends que peut avoir Patrice Talon avec ses prédécesseurs, il y a certainement la main discrète de Bruno Amoussou.
M.M