Il pourrait y avoir un peu de tension sociale dans les prochains jours au Bénin. L’adoption de plusieurs points prévus à l’ordre du jour de la prochaine session extraordinaire du Parlement devrait susciter de vives réactions au sein de l’opinion. Ce sont de points sensibles qui apporteront de grands bouleversements.
Le Bénin connaît un calme relatif depuis quelques semaines. Il y a moins de tensions dans le pays. Mais tout pourrait changer dans quelques jours. Certains fonctionnaires pourraient être amenés à manifester leurs mécontentements et relancer l’atmosphère invivable qui caractérise le Bénin depuis que Patrice Talon a accédé au pouvoir. En effet, la session extraordinaire qui s’ouvre au Parlement le lundi prochain comporte assez de points dont l’adoption pourrait chambouler le climat social. Au nombre de ces points, il y a le Code électoral. Des députés du Bloc de la majorité parlementaire (Bmp) ont fait, il y a peu, des propositions devant transformer le code actuellement en vigueur. Selon ces propositions, le cautionnement prévu pour les candidats à la présidentielle devrait être désormais de 250 millions F Cfa contre 15 millions F Cfa actuellement. Chaque liste de candidatures devrait payer pour les législatives désormais 200 millions F Cfa au lieu de 8, 3 millions F Cfa pratiqués jusque-là. Par ailleurs, les anciens présidents de la République qui désirent devenir députés, pourraient perdre leur statut d’ancien Chef d’Etat. Des innovations qui introduisent l’exclusion sur l’échiquier national puisque les nouveaux cautionnements vont décourager les moins fortunés. Ces propositions ont suscité des commentaires critiques et leur adoption devrait provoquer d’indignation puisqu’elles devraient mettre fin aux rêves de plusieurs potentiels candidats. Le second point qui peut susciter de tollé reste la proposition de loi modifiant et complémentant la loi n°2001-09 du 21 juin 2002 portant exercice du droit de grève en République du Bénin. Après les magistrats et les agents de la santé, les enseignants pourraient se voir retirés le droit de grève. Dans leur parution d’hier, certains quotidiens ont déjà évoqué le sujet. Le gouvernement de la Rupture veut en réalité en finir avec les mouvements de grève. Le Chef de l’Etat déteste la contradiction. Et il guettait l’occasion pour porter l’estocade au mouvement syndical au Bénin. Les députés du Bmp ont certainement accepté de l’aider à atteindre l’objectif. Si c’est le cas, il reste à savoir si les organisations syndicales de l’enseignement accueilleront la nouvelle sans réagir. Mais d’ores et déjà, certains observateurs soutiennent qu’il y a risque de perturbation de la prochaine rentrée scolaire. Au cours de la même session extraordinaire, des demandes d’autorisation de poursuite d’anciens ministres et de demande de levée de l’immunité de députés seront aussi examinées. Les anciens ministres Komi Koutché, Valentin Djènontin, Fatima Amadou Djibril et Yaya Aboubakar et Simplice Codjo pourraient se retrouver devant la Haute cour de justice. Une situation qui ne pourrait pas laisser indifférents certains membres de la classe politique ni les soutiens de ces anciens ministres. Le Bénin est à la veille des législatives et beaucoup pourraient interpréter ces demandes d’autorisation de poursuites judiciaires qui ciblent seulement les membres de l’opposition comme de l’acharnement et une volonté délibérée de les écarter de la compétition politique. La prochaine session extraordinaire du Parlement est donc très chargée et ses résultats pourraient être à la base de vives critiques à l’égard du gouvernement voire de réelles tensions sociales. Seulement, à quelques mois des législatives, le Bénin a-t-il encore besoin de soubresauts? N’est-il pas temps que le Parlement fasse de propositions normatives consensuelles? N’est-il pas temps que le gouvernement débusque aussi les nombreux pilleurs de l’économie nationale qui jonchent la mouvance présidentielle? Ce sont des questions importantes qui doivent faire réfléchir les décideurs politiques.
Mike MAHOUNA