Qui pourra jouer les Cassandre ? La Renaissance du Bénin est en pleine crise de régénérescence ou de mort. Quelle pourrait en être l’issue ? Analysons ensemble les faits ! Depuis sa création en 1994, c’est la première fois que la Renaissance du Bénin (Rb) subit une crise d’une aussi grande ampleur.
Courant le week-end du 19 mai 2017 à Abomey, la cité historique d’où fut lancé à Goho l’appel de la rivière aux biches assoiffées, des membres du Bureau politique (instance majeure de haut niveau dans la hiérarchie des organes) du Parti, ont décidé de suspendre le président en exercice : Léhady Soglo. Par la même occasion, ils ont désigné un président intérimaire, Georges Bada et mis en place un comité d’organisation d’un congrès placé sous l’autorité de Me Abraham Zinzindohoué. La période des 23, 24 et 25 juin 2017 retenue à ces assises pour la tenue du congrès est confirmée par les Réformistes. Une procédure de rendre réglementaire la présidence intérimaire a été engagée, et le ministre de l’Intérieur, Sacca Lafia, en a accusé bonne réception et donné quitus à Georges Bada de jouir de son titre de président par intérim de la Rb. Dans le même temps, le président déçu se débat comme un poisson retenu hors de son milieu naturel. Il multiplie les communiqués. Et, par l’entremise d’un rendu public, le 6 juin 2017 il a exclu les “frondeurs”. A ce stade des faits, on retient que les assises d’Abomey ont exclu Léhady Soglo qui, à son tour, a exclu les Réformistes. La Rb ne vole-t-elle pas ainsi en éclats ? Ce qui est évident, c’est qu’au-delà d’une simple fracture, la crise dynamite très sérieusement le Parti des Soglo dont la performance électorale connaît depuis peu une courbe descendante. De 29 députés, naguère, au Parlement, avec des percées à Parakou, la Rb est réduite aujourd’hui à sa portion congrue, malgré le leadership incontesté de Rosine et Nicéphore Soglo. Dans la vie de ce Parti, il a souvent été reproché aux dirigeants de conduire les destinées de la Rb à l’image d’un regroupement familial. De ce fait, certaines personnalités du Parti se sont toujours tenues à l’écart des instances dirigeantes et s’identifient plutôt au président Nicéphore Soglo. C’est le cas du président du comité d’organisation du congrès prochain, Abraham Zinzindohoué. Si cet avocat fidèle et docile au couple Soglo, qui a fait ses expériences dans de hautes juridictions comme la Cour suprême du Bénin et la Cour de Justice de l’Uemoa (Union économique et monétaire ouest africaine), en vient à accepter l’organisation du congrès au profit des Réformistes, on peut présumer de la profondeur de la crise. Dès lors, il reste d’un côté des conservateurs géniteurs de la Rb et de l’autre, se rangent de nouveaux acteurs qui souhaitent prendre leur destinée en main et prouver qu’il est possible de gérer le parti autrement. Sur des plateaux de balance, on peut se demander lequel pourra soulever l’autre comme un fétu de paille. De toutes les façons, quelle que soit la tendance qui prendra le dessus à l’issue du prochain congrès et de probables batailles juridiques, la Rb originelle aura été à jamais diminuée, si elle se maintient.
Jean-Claude Kouagou