Le président de la République a interdit à travers une correspondance la passation des marchés gré à gré dans les ministères et organismes rattachés. Mais beaucoup pensent que Patrice Talon feint simplement de montrer qu’il est attaché à la bonne gouvernance tant durant 16 mois, le régime de la Rupture a asséché les caisses publiques sur la base de ” gré à gré”.
Le Chef de l’Etat prendrait le peuple pour des moutons de panurge. Ses décisions le prouvent de jour en jour. La dernière en date porte sur les marchés de gré à gré dans l’Administration. En effet, depuis le 06 avril 2016, jour de l’investiture du président Talon, c’est le 03 août 2017 qu’il a jugé utile de mettre fin à la pagaille organisée au vu et au su de tous. Dans une lettre récemment envoyée au ministre des Finances, Patrice Talon a en effet écrit : « Il m’est revenu de manière insistante, que des marchés sont conclus par mode de gré à gré au sein de certains ministères ainsi que d’organismes qui leur sont rattachés, et soumis à l’approbation de vos services. Je vous demande de vouloir bien prendre les mesures urgentes à l’effet de ne plus donner suite à ce genre de marché sans l’autorisation du Conseil des ministres». Le président Talon veut ainsi souligner son attachement à la gestion saine. Or, depuis plusieurs mois, son gouvernement qui prône pourtant la Rupture travaille quasiment sur la base de ces contrats qui sont des nids de corruption et d’enrichissement illicite. Durant 16 mois, le Chef de l’Etat agissait comme s’il n’entendait pas les dénonciations des centrales et confédérations syndicales ainsi que d’autres organisations de la société civile. Depuis le 06 avril 2016, ce sont les entreprises des proches du Chef de l’Etat qui gagnent les appels d’offre lancés par l’Etat. A l’aéroport international Cardinal Bernardin Gantin de Cotonou, la Société Morpho Dys dirigée par un proche de Talon, a gagné le marché de gré à gré d’un système de contrôle. Un marché juteux de réalisation de cartes scolaires avait également été octroyé à la Société Samtal Technologie appartenant à un dignitaire du régime de la Rupture par mode de gré à gré. Grâce à la veille citoyenne, ce contrat a pu être annulé. En mai dernier, le Parti communiste du Bénin (Pcb) accusait Patrice Talon de pratiquer le népotisme. Jean Kokou Zounon déclarait : « C’est une politique de famille. Tout est concentré dans les mains de Patrice Talon ». A l’entendre, des entreprises proches de Talon ou appartenant aux membres de sa famille bénéficient, auprès de l’Etat, des traitements de faveur à travers des contrats. Mais Patrice Talon n’a pu jamais réagir. Il a laissé son entourage s’en mettre plein les poches. Aujourd’hui, il veut jouer le «Monsieur propre». Pour certains observateurs, la correspondance envoyée au ministre Wadagni reste une mise en scène. Pour d’autres, ladite lettre confirme le penchant des collaborateurs pour ces contrats et décrédibilise davantage le régime de la Rupture. Le Chef de l’Etat n’avait pas à offrir ce cirque. Si le gouvernement était vraiment préoccupé par la bonne gouvernance, son chef aurait déjà donné le ton depuis le début de son mandat. Le Bénin dispose d’un Code des marchés publics qui précise clairement les conditions encadrant le contrat de gré à gré. Le président de la République n’avait qu’à demander simplement le respect strict de ce texte. Aujourd’hui, les caisses publiques ont déjà souffert des légèretés de certains acteurs du régime. La décision tardive de Patrice Talon ne pourra jamais réparer le tort déjà créé. Bien au contraire, le Chef de l’Etat veut certainement s’assurer que ses adulateurs continuent d’être bien choyés.
Mike MAHOUNA