10% au niveau national est une exigence légale posée à l’article 184 du code électoral applicable au Bénin, le juge administratif de la Cour Suprême statuant en matière de contentieux électoral n’est pas maître de la loi mais serviteur de la loi. Il ne lui revient pas d’annuler une disposition légale.
La démocratie est souvent analysée sous l’angle de l’élection, d’où l’expression « démocratie électorale ». Ainsi, l’organisation d’élections devient un critère d’évaluation de la vitalité démocratique d’un pays. De ce fait, les élections doivent être crédibles. Des élections crédibles sont caractérisées par l’inclusion, la transparence, la responsabilité, et la compétitivité.
Ainsi, pour assurer une bonne organisation des élections communales de mai 2020, consciente des enjeux de ce scrutin et des défis qu’elle aura à relever, la Commission Electorale Nationale et Autonome (CENA) s’est isolée dans la belle ville historique d’Agoué les 6 et 7 février 2020, le temps d’un atelier d’appropriation du cadre légal régissant les élections au Bénin. Ce cadre d’échanges animé par des universitaires de rang magistral, des experts constitutionnels et électoraux, des conseillers à la Cour suprême, des préfets, des représentants des institutions de la République, de la société civile et des partis politiques ainsi que des spécialistes de la sécurité devait permettre aux acteurs de s’approprier et de s’entendre sur le cadre légal des élections.
Précisément, selon ses termes de référence, l’atelier vise à : « relever les innovations contenues dans les lois touchées par les réformes et les responsabilités qu’elles induisent pour chaque structure impliquée dans l’organisation des élections ; aider à partager une compréhension harmonisée des contenues des différentes lois ; anticiper les difficultés susceptibles de surgir dans la mise en œuvre des différentes lois régissant les élections et proposer des approches de solutions. ».
A cette occasion, la CENA a livré son interprétation de certaines dispositions du Code électoral dont trois ont suscité la contestation de l’Association Nationale des Communes du Bénin (ANCB) dont les représentants participaient audit atelier. Il s’agit :
d’abord, des conditions du dépôt des listes de candidature en application des dispositions de l’article 41 du Code électoral. Dans le cadre des élections communales, la CENA considère que les partis politiques peuvent présenter des listes comprenant moins de candidats que de sièges à pourvoir et déposer moins de dossiers que de circonscriptions électorales. Les listes incomplètes seraient donc admises.
ensuite, de la faculté que s’offre la CENA de reprendre le dépouillement des résultats en l’absence de toute contestation en référence aux articles 15 et 16 du Code électoral ;
et enfin de la répartition des sièges conformément aux articles 184 et 187 du Code électoral. Pour la répartition des sièges, la CENA
n’entend retenir que les suffrages recueillis par les partis ayant atteint le seuil minimal de 10% au plan national, à l’exclusion des suffrages exprimés en faveur des partis éliminés.
Pour le Président de l’ANCB, toutes ces interprétations violent les articles visés par le Code électoral. Contre ces lectures qui vont se muer en mesures ou en décisions de la CENA, l’ANCB représenté par son Président, Monsieur Luc Sètondji ATROKPO, a saisi en contestation, sur le fondement de l’article 110 du Code électoral, la chambre administrative de la Cour suprême par un recours daté du 8 février 2020, soit le lendemain de la fin de l‘atelier et enregistré le 11 février au greffe de la plus haute juridiction administrative du Bénin sise dans la Capitale Porto-Novo. Le recours en contestation est différent du recours pour excès de pouvoir ou du recours en annulation ou du recours en annulation pour excès de pouvoir en ce sens qu’il permet au requérant d’annihiler une décision administrative sans demander son annulation.
Au moment où le recours a été introduit, la CENA n’avait officiellement pris aucun acte matériel et/ou positif pour formaliser ses lectures du Code électoral en ces trois points, de sorte que la CENA peut raisonnablement prétendre qu’elle n’a pris, ni rendu publique aucune décision portant interprétation ou modalités d’application du Code électoral.
On entrevoit déjà la question qui se dédouble. D’une part, les propos tenus par le Président de la CENA lors d’un atelier fut-il d’appropriation du cadre électoral peuvent-ils être considérés comme des actes administratifs décisoires ? D’autre part, ces mesures que la CENA s’apprêtait à prendre relevaient-elles de la compétence du juge électoral ?
Le contentieux électoral se définit comme cette branche du contentieux qui traite des litiges relatifs au processus électoral et qui tend à vérifier la régularité externe et interne d’un tel processus. Le contentieux électoral peut se situer en amont de l’élection. On le qualifie de contentieux pré-électoral avec cette idée que des contestations peuvent surgir avant l’ouverture de la campagne, dès la fixation de la date des élections. (Voir Jacques Arrhighi de Casanova, Le juge des actes préparatoires à l’élection, Les nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel, 2013/4 n°41, pp. 7-16 ; Francis Delpérée, Le contentieux électoral, Annuaire international de justice constitutionnelle, 12-1996, 1997, pp. 397-415).
Très éprouvée par les fortes secousses des élections législatives à l’occasion desquelles elle a été violemment critiquée, c’est de bonne foi que la CENA prend des mesures lui permettant d’assurer une organisation parfaite des élections communales de 2020. L’arrêt commenté intervient deux mois avant les élections communales et va remettre le scrutin à venir sur les rails de la légalité. Il met également en lumière l’efficacité du recours en contestation devant le juge administratif.
Malheureusement pour la CENA et heureusement pour la légalité, la chambre administrative de la Cour suprême répond positivement aux préoccupations du Président de l’ANCB en admettant la justiciabilité des mesures contestées (I). De fait, la question de leur légalité devenait inévitable (II).
I- LA JUSTICIABILITÉ DES MESURES CONTESTÉES
En l’absence de décisions matérialisées de la CENA, le juge électoral était attendu en la forme sur les questions préalables portant sur sa compétence (A) et surtout la recevabilité du recours (B).
A-La compétence du juge électoral
Saisissant la chambre administrative de la Cour suprême, la requérante, en invoquant l’extrême urgence née du démarrage du processus électoral, s’est fondée sur l’article 110 du Code électoral suivant lequel : « Tout le contentieux électoral en ce qui concerne les élections communales relève de la compétence de la Cour suprême. ». Par cette disposition, le législateur a entendu confier « l’ensemble du contentieux, tant en amont qu’en aval, avant, pendant et après les élections communales proprement dites au juge électoral de la Cour suprême. Quelle est l’étendue des pouvoirs du juge électoral ?
In limine litis, la défenderesse représentée par un membre de la CENA, Maître Freddy HOUNGBEDJI soulève l’incompétence de la Cour pour connaître des contestations élevées par l’ANCB, lesquelles constituent selon elle un recours en interprétation du Code électoral dans la mesure où la CENA « n’a pris ni rendu publique aucune décision portant interprétation ou modalités d’application » du Code électoral. La compétence est polysémique. Il faut l’entendre ici comme le pouvoir reconnu à une juridiction de connaître d’un litige. Pour se prononcer sur sa compétence, le juge fait appel aux considérations de forme et de fond. En l’espèce, le juge se montre pédagogique, presque professoral en rappelant que « la typologie du contentieux électoral, qu’elle soit sous l’angle jurisprudentiel ou doctrinal, embrasse toutes les opérations relatives à l’élection, qu’il s’agisse des actes préparatoires, d’organisation, de proclamation des résultats et de répartition des sièges et relève de la compétence du même juge, à moins que la loi en dispose autrement ».
La chambre administrative de la Cour suprême en tire deux déductions. La première : les mesures prises par la CENA ou qu’elle envisage de prendre et que conteste l’ANCB entrent bien dans l’ensemble des actes préparatoires des élections communales. Sont préparatoires, les actes qui préparent et annoncent la prise de décision qui elle produira des effets juridiques. Ils sont en principe dénués d’effets juridiques et ne peuvent en tant que tels faire l’objet de recours pour excès de pouvoir car leur annulation n’aurait aucun intérêt pour le droit objectif et positif.
La seconde : les mesures contestées sont susceptibles de recours devant le juge électoral. La difficulté réside dans le fait que la requérante a saisi la chambre administrative de la Cour suprême. La haute juridiction trouve la solution pour racheter la requérante en considérant que les moyens au fondement du recours ont été exclusivement tirés du Code électoral et ont trait à l’organisation des élections communales. Dès lors, conclut la juridiction saisie, la requérante a entendu sans aucun doute s’adresser au juge électoral qui se reconnaît ainsi compétent. Très opportunément, le juge rappelle que ce type de contentieux électoral n’est soumis suivant la doctrine et la jurisprudence à aucune exigence de délai ni de forme.
Dès lors, si la compétence permet de vérifier si le requérant est à la bonne porte, la recevabilité permet de s’assurer que le requérant à la clé d’accès au juge.
B- la recevabilité du recours
Les conditions de recevabilité d’un recours adressé au juge administratif en général, au juge électoral en particulier sont celles qui permettent au juge compétent d’examiner l’affaire au fond. La recevabilité est d’une importance telle qu’elle est d’ordre public ; ce qui signifie qu’elle peut être soulevée par le juge de sa propre initiative. Elle conduit le juge à rechercher l’intérêt et/ou la qualité pour agir.
C’est à cette enquête que se livre le juge électoral de la Cour suprême du Bénin en l’espèce. Ce qui lui permet de s’assurer de la justiciabilité des mesures contestées par l’ANCB.
D’emblée, la CENA a soulevé l’irrecevabilité du recours motif pris de ce que l’ANCB n’est pas un parti politique et ne justifie d’aucune qualité, ni d’aucun intérêt à agir, surtout que la défenderesse n’a pris aucun acte susceptible d’être déféré au juge électoral. Pour son représentant, les simples propos tenus au cours d’un atelier ne constituent pas des décisions ou des actes justiciables.
Pour la requérante en revanche, les mesures querellées ont été annoncées publiquement par les membres de la CENA à l’occasion du séminaire au cours duquel elle a porté à la connaissance des acteurs du processus électoral, les mesures prises dans la mise en œuvre du Code électoral. Il s’agit en effet des propos tenus notamment par le Président de la CENA, qui ont le mérite de fixer les séminaristes sur la façon dont cette institution entend mettre en œuvre les articles visés du Code électoral. Cette lecture devra se traduire « conséquemment dans leur mise en œuvre ». Or, si cette lecture est illégale, c’est l’ensemble du processus électoral qui serait ainsi dévoyé.
L’ANCB qui est une association de promotion du développement communal a intérêt à ce que les futurs élus communaux soient bien élus conformément à la loi ; surtout que les membres de ce creuset sont des élus issus des partis politiques qui concourent à l’animation de la vie politique. La chambre de la Cour suprême statuant en matière électorale va plus loin en relevant que « plus que les partis politiques qui pourraient s’accommoder voire partager une inexacte lecture de la loi électorale dont la finalité est l’organisation transparente, libre et sincère des élections, une association du genre de l’ANCB a qualité et intérêt… » à contester les actes querellés en ce qu’ils sont susceptibles de porter atteinte à la transparence et à la sincérité du scrutin communal.
La pensée et le raisonnement du juge électoral de la Cour suprême donne des couleurs au contentieux à la fois administratif et surtout constitutionnel en ce sens qu’il énonce un principe à valeur constitutionnelle : « Considérant par ailleurs que dans un régime de démocratie pluraliste comme celui du Bénin, l’exigence de la tenue d’élections régulières, libres, transparentes et sincères est élevée au rang de principe à valeur constitutionnelle ». Si l’arrêt commenté est un grand arrêt, ce considérant en est le plus par sa portée générale qui transcende le contentieux des élections communales pour embrasser tous types d’élections dans une démocratie moderne comme celle du Bénin.
Cédant à une fiction rétroactive de ce grand considérant, l’on pouvait rêver de voir le juge des élections législatives de 2019 déclarer contraire à la Constitution, sur le fondement de ce principe à valeur constitutionnelle, le scrutin qui excluait de droit ou de fait les partis d’opposition. L’on pouvait en effet considérer que dans un régime de démocratie pluraliste comme celui du Bénin, des élections ne pouvaient pas être considérées comme étant libres et disputées en l’absence de partis d’opposition ou qu’un scrutin sans opposition n’est carrément pas démocratique. Dans le contexte béninois, ce considérant est un vibrant hymne à la démocratie. La notion d’intérêt est admise de façon large.
Ainsi, la chambre administrative de la Cour suprême béninoise a-t-elle souvent jugé que l’appartenance à un corps donnait droit d’agir contre les actes administratifs individuels concernant d’autres agents. CACS, Affaire n° 2016-54/CA du 23 mai 2019, DAGA Salihou et HOUNSINOU PascalMartial c/ Président de la République et un autre, rectifié par l’arrêt n° 357/CA du 14 août 2019 rendu dans le dossier n°2019-22/CA, Procureur général près la Cour suprême C/ qui de droit : « il est généralement admis devant le juge administratif que même en l’absence de tout préjudice personnel, le recours est recevable contre les mesures concernant le statut et les intérêts de carrière des agents qui, au nom de la sécurité juridique du corps auquel ils appartiennent, ont le plus grand intérêt à ce que les règles qui les gouvernent, soient respectées de tous ».
Par ailleurs, la question de la nature du recours reste à régler. Si l’on admet que c’est l’interprétation du Code électoral donnée par la CENA qui est contestée, le recours visant à fixer sur le sens réel des dispositions concernées n’est-il pas un recours en interprétation ? S’il s’agit d’un recours en interprétation, la CENA a beau jeu de plaider l’incompétence du juge électoral. Celui-ci estime qu’il s’agit d’une contestation contre la lecture de la CENA c’est à dire « son opinion sur la mise en œuvre des dispositions indexées par la requérante ». Or, la CENA, « autorité administrative dotée d’un pouvoir de décision » est « dépositaire des conclusions ou des grands enseignements qui en sont issus ». Dès lors, la question de leur conformité à la loi devenait légitime.
Ii-L’ILLÉGALITÉ DES ACTES PRÉPARATOIRES
La nature des actes déterminée (A), le juge électoral de la Cour suprême se prononce sur leur conformité au Code électoral (B).
A-La nature des actes contestés
Quels actes ont été déférés à la censure du juge électoral de la Cour suprême ? L’ANCB n’a cité ni produit aucun acte matérialisant la lecture prêtée à la CENA. Le recours n’est d’ailleurs accompagné que des termes de référence et du programme des activités de l’atelier d’Agoué. Ce sont des propos des membres de la CENA qui ont été déférés à la censure du juge électoral de la Cour suprême qui règle la question en un seul considérant : « Aussi bien la doctrine que le juge administratif admettent qu’une décision administrative peut prendre plusieurs formes y compris celle verbale ». L’arrêt commenté est donc celui du contentieux de la parole d’une autorité administrative dotée du pouvoir de décision. C’est un lieu commun de rappeler qu’une décision administrative peut être verbale ou même résulter d’un silence de l’administration. Sont constitutifs d’actes administratifs, les gestes effectués par les agents de police réglant la circulation au carrefour Le Bélier à l’entrée de Cotonou. Pour un exemple d’acte administratif verbal, voir CE, 14 décembre 1994, Confédération Helvétique.
En l’espèce, le caractère verbal des mesures contestées doit être nuancé. En effet, le recours de l’ANCB daté du 8 février 2020 a été enregistré au greffe de la Cour suprême le 11 février 2020. A ce moment, seule la parole des membres de la CENA a fait l’objet de contestation. On était donc dans la théorie des actes verbaux. Mais dans ses écritures ainsi qu’à l’audience, le représentant de la CENA, Maître Freddy HOUNGBEDJI, a fait valoir que les mesures contestées ont été validées par les délibérations de deux assemblées plénières de la CENA tenues les vendredi 14 et lundi 17 février 2020. La parole s’est donc fait délibération et a été matérialisée en actes « décisoires et justiciables par conséquent du contrôle du juge électoral ».
Toutes les conditions sont ainsi réunies pour un examen au fond des moyens des deux parties.
B-La contrariété avec le Code électoral
La chambre administrative de la Cour suprême statuant en matière électorale a rejeté l’ensemble des interprétations données par la CENA lors du séminaire d’Agoué et a fait droit à l’ensemble des demandes de l’ANCB.
D’abord, le premier point est relatif à l’application de l’article 41 du Code électoral sur le fondement duquel la CENA envisageait de permettre aux partis politiques devant prendre part aux élections communales du 17 mai 2020, de présenter des listes contenant moins de candidats que de sièges à pourvoir et de déposer moins de dossiers que de circonscriptions électorales, admettant ainsi la possibilité de listes incomplètes. Or, l’article 41 dispose que « pour les élections législatives ou communales, les corrections ne peuvent, en aucun cas, concerner l’ordre des candidatures sur la liste ». Ce qui exclue tout « changement de candidat sauf en cas de décès ou d’une candidature sur plusieurs listes ».
La convocation de l’article 77 alinéa 2 du Code électoral permet de retenir que « les partis politiques sont tenus de présenter des listes de candidats dans tous les arrondissements du territoire national », soit les 546 circonscriptions en respectant le nombre de candidats prévu pour chacune, suppléants y compris. Les corrections et autres mesures de régularisation autorisées par le Code électoral après le dépôt des candidatures doivent s’opérer à l’intérieur des dossiers et viser la régularité et la validité des pièces constitutives. Le changement de dossier n’est donc pas possible, la modification interne ou le complément de pièces est autorisée. Les listes sont donc intangibles.
Ensuite, la CENA estimait en application des articles 15 et 16 du Code électoral qu’elle pouvait se permettre de reprendre le dépouillement des résultats du scrutin même en l’absence de toute contestation. Selon la Cour suprême, cette mesure viole la loi en ce qu’elle conduit la CENA à s’immiscer dans le champ de compétence du juge électoral et à faire douter de la transparence et de la sincérité du processus électoral.
Le juge électoral protège jalousement son champ de compétence et ne tolère aucune immiscion de la CENA. Seul le juge électoral, martèle la Cour, est habilité, en cas de contestation, à reprendre le dépouillement des résultats et à procéder à des réformations ou corrections jugées par lui nécessaires. La lecture de la CENA, ajoute la Cour, est de nature à rompre le principe d’égalité de traitement entre les partis ou les listes de candidatures devant la loi. Or, ce principe est à la fois une exigence constitutionnelle et un principe général de droit qui s’impose même au législateur.
Enfin, la CENA considérait qu’en application des articles 184 et 187 du Code électoral, seuls les suffrages des partis ayant atteint le seuil minimal de 10% au plan national devaient être pris en compte lors de la répartition des sièges, à l’exclusion des partis n’ayant pas atteint ce seuil et donc éliminés.
Selon la Cour, si cette interprétation était retenue, elle conduirait à « annihiler » les suffrages des électeurs recueillis par lesdites listes, ce qui serait un « dévoiement de l’esprit du Code électoral de nature à amener la CENA à annuler ou à écarter des suffrages exprimés, toute chose dont elle n’a ni la compétence ni le pouvoir ». Le juge électoral ne saurait admettre que la CENA contrarie le caractère représentatif du mandat électoral tel que garanti et protégé par l’article 3 de la Constitution.
Dans tous ces cas, le juge électoral a rétabli le bon sens des dispositions du Code électoral.
La requérante n’a pas demandé l’annulation des délibérations issues des assemblées plénières de la CENA et la Cour ne l’a point accordée. C’est pour cette raison que dans le dispositif de l’arrêt commenté, le juge électoral, sur un ton ferme et autoritaire,prescrit les contre-mesures qui annihilent toutes les interprétations de la CENA.
Le commentateur est admiratif de la célérité de la procédure et de la qualité rédactionnelle de l’arrêt. En effet, la requête introductive d’instance a été enregistrée au greffe de la Cour suprême le 11 février et communiquée à la CENA le 13 février, avec un délai de 48 heures pour produire ses observations en défense. L’audience a eu lieu le 17 février et l’arrêt rendu le 18 février a été notifié le 21 février. Tout était bouclé en 10 jours. Par ailleurs, l’arrêt qui s’étale sur 14 pages tient la route sur la forme et sur le fond du raisonnement.
La CENA en a pris acte. Voilà comment un séminaire et des paroles peuvent lier un contentieux et donner naissance à un grand arrêt.
Ibrahim David SALAMI
Agrégé des facultés de droit,
Professeur Titulaire,
Avocat au barreau du Bénin