Il ne quittera pas de si tôt la scène publique. Ayant acquis un nouveau statut public à la faveur de la reconnaissance officielle du parti Force cauris pour un Bénin émergent (Fcbe) en septembre 2019, Paul Hounkpè est de nouveau sous les feux des projecteurs. Sa participation au dialogue politique d’octobre 2019 et à la présidentielle d’avril 2021 lui assure une certaine longévité politique. Pourtant, beaucoup de gens ne vendaient pas chère sa peau au lendemain de la démission de Boni Yayi de la Fcbe dont le contrôle lui a échappé. En dépit des railleries qui lui collent à la peau du fait de sa piètre prestation à l’Assemblée nationale courant 2015 alors qu’il officiait en qualité de ministre de la culture, Paul Hounkpè a pu réussir jusque-là à tirer son épingle du jeu.
Le veinard
La plus belle chose qui lui est arrivée au cours de sa carrière politique est indubitablement son parachutage au poste de secrétaire exécutif national du parti Fcbe à la suite de sa reconnaissance officielle. Pendant que les caciques du parti se sont engagés dans un bras de fer avec le ministère de l’intérieur, Hounkpè et sa bande ont su surpasser cette difficulté en s’offrant le précieux récépissé de reconnaissance de cette formation politique au terme d’un congrès extraordinaire aux contours demeurés flous jusqu’à présent. Mais ce qu’on retient, c’est que son ascension politique a commencé à partir de son positionnement surprise à la tête du parti. Voué aux gémonies par ses anciens camarades qui ont tourné dos au parti, Hounkpè a vaille que vaille tenu la maison. La chance lui a souri lorsqu’il réussit à s’offrir plus de 10% des suffrages aux termes des municipales et communales de 2020. C’est ce résultat qui l’a propulsé en qualité de chef de file de l’opposition. L’article 7 de la loi n°2019-45 du 25 novembre 2019 portant statut de l’opposition en République du Bénin est sans équivoque. « Est considéré comme l’un des chefs de file de l’opposition, tout chef d’un parti politique de l’opposition dont le nombre de députés à l’Assemblée nationale constitue de façon autonome un groupe parlementaire. Est également considéré comme l’un des chefs de file de l’opposition, tout chef d’un groupe de partis de l’opposition constitué en groupes parlementaires à l’Assemblée nationale. Est enfin considéré comme l’un des chefs de file de l’opposition, tout chef de parti politique représenté ou non à l’Assemblée nationale mais ayant totalisé au moins 10% des suffrages exprimés à l’issue des dernières élections législatives ou communales. En cas d’absence de représentation de l’opposition à l’Assemblée nationale, est désigné chef de file de l’opposition, le chef du parti politique de l’opposition ayant obtenu le plus grand nombre d’élus communaux. En cas d’égalité du nombre des élus communaux, le chef de file de l’opposition est le chef du parti de l’opposition ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages exprimés lors des dernières élections communales ». C’est donc le dernier alinéa de cette disposition légale en vigueur qui lui a offert la consécration entérinée par le décret n°2021-183 du 28 avril 2021.
Des droits mais aussi des obligations
Le statut de chef de file de l’opposition donne droit à certains avantages. Ainsi que le dispose l’article 9 de la loi susmentionnée, « les partis politiques de l’opposition bénéficient d’un accès équitable aux moyens officiels d’information et de communication. Ils jouissent de toutes les libertés publiques garanties par la Constitution ». A l’article 11 de renchérir que l’opposition peut être consultée par le président de la République sur les questions importantes engageant la vie de la nation, notamment les menaces à la paix civile, à l’intégrité territoriale, l’engagement des forces de défense à l’étranger et sur toute autre question d’intérêt national et international… Au titre des devoirs, le chef de file de l’opposition a l’obligation d’animer la vie politique et de se positionner comme une alternative au pouvoir en place. Bénéficiant déjà du financement public des partis, le parti Fcbe dont Paul Hounkpè est le premier responsable ne devrait pas avoir de mal pour remplir cette obligation. A peine nommé, l’heureux élu a levé un coin de voile sur ses intentions. « « Nous allons chercher le juste milieu pour être une opposition responsable face au pouvoir…Nous ferons en sorte que ce qui est essentiel à notre pays, à savoir la paix, puisse être préservé ; que le Bénin nous rassemble et que pour toute revendication, nous ayons recours au dialogue et à la recherche du consensus ». A l’épreuve des faits, l’opinion a maintenant plus que jamais l’occasion d’apprécier la pertinence de son combat politique.
Houndété, Atchadé…gros perdants ?
Pendant que Paul Hounkpè a fait le choix de s’affranchir de la tutelle pesante de Boni Yayi, Eric Houndété, Nouréini Atchadé, Eugène Azatassou et compagnie ont opté pour la fidélité à l’ex patron du palais de la Marina. Visiblement, au vu des événements de ces deux dernières années, c’est le clan Hounkpè qui réussit le mieux à s’offrir une position confortable. Non seulement, ceux-ci ont participé au dialogue politique, aux municipales et communales de 2020 mais aussi à la présidentielle de 2021. Absents à ces rendez-vous, les ténors du parti « les Démocrates » n’ont plus vraiment voix au chapitre. Nourrissant de nombreux griefs contre la réforme du système partisan, ces animateurs de la vie politique nationale, fragilisés et esseulés pour le moment, rongent leur frein. Auront-ils l’occasion de rebondir et de briller à nouveau de tout leur éclat ? Sont-ils condamnés à une descente aux enfers ? Ce qui est certain, en politique, rien n’est jamais acquis. A tout moment, la roue peut tourner.