Le président de l’Ong Changement social Bénin, Ralmeg Gandaho saisit l’occasion de la célébration de la Journée internationale de la démocratie, le 15 septembre, pour appeler à des assises entre…

Ralmeg Gandaho à propos du processus démocratique : « Nous sommes à un carrefour… »

Ralmeg Gandaho à propos du processus démocratique : « Nous sommes à un carrefour… »

Le président de l’Ong Changement social Bénin, Ralmeg Gandaho saisit l’occasion de la célébration de la Journée internationale de la démocratie, le 15 septembre, pour appeler à des assises entre tous les acteurs du cycle électoral. Pour lui, c’est la solution pour passer en revue les difficultés et prendre de bonnes résolutions dont l’application permettra de se concentrer sur le respect des principes démocratiques.

Le modèle démocratique du Bénin vous satisfait-il ?
Depuis 1990, nous avons connu des alternances régulières au niveau de tous les pouvoirs de représentation du peuple. Nous avons aussi connu une certaine évolution législative que certains pourraient apprécier soit de progrès, soit de régression. Mais fondamentalement, il faut se souvenir que le Bénin, après la Conférence nationale, a renoué avec certaines valeurs et certains principes universels. Nous avons successivement adhéré au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Si je dois m’attarder sur le Pacte relatif aux droits sociopolitiques avec ses exigences qui nous prédisposent à une vie démocratique devant assurer l’Etat de droit, relativement aux principes auxquels nous avons souscrit au niveau des Nations-Unies, de la Cedeao, de l’Union africaine, et surtout avec le protocole de Dakar de 2001, je crois que nous avons vraiment régressé. Nous nous sommes progressivement détachés de ces principes avec les écarts qu’on observe entre notre évolution normative et les exigences qu’ils incarnent. Donc, depuis la Conférence nationale de 1990, la démocratie à travers maintes élections s’est exprimée. Mais après, en matière de cadre juridique et de vitalité institutionnelle, je pense que nous avons progressivement pris des distances avec les principes. Jadis, on nous pointait comme modèle et cela renforçait notre position, comme modèle d’État de droit et de démocratie dans les différentes communautés.

A quoi sont dues les difficultés observées ces derniers temps ?
J’aime souvent rappeler la soif de réformes qui animait un acteur comme moi en 2015 notamment par rapport au système partisan. A l’avènement du régime du Nouveau départ, le diagnostic était partagé de tous mais la posologie, ou la thérapie de ceux qui avaient la manette du pouvoir, pour décider des orientations, n’a pas convaincu. Et quand on vit ce qu’on a vécu en avril 2021, on est tenté de se demander si les réformes n’ont pas ignoré la richesse que l’humain constitue. Car, entre les faits des acteurs politiques, qui sont les principaux bénéficiaires de la réforme du système partisan et avec l’évolution des processus électoraux depuis 2019, on peine à comprendre. C’est-à-dire, qu’entre les faits et les normes, il y a un grand écart. Les réformes n’ont pas pris en compte suffisamment le potentiel commis qu’est l’homme par rapport aux faits qui désormais trahiront totalement les normes. Il faut alors retenir finalement que nous avons évolué progressivement dans la démocratie avec une alternance régulière à travers des élections, des institutions qui tiennent encore quand bien même leur crédibilité, leur légitimité commencent à poser problème. Est-ce que les réformes devraient être conduites ainsi pour que nous puissions corriger le tir que nous avons tous souhaité depuis 2015, où nous avons commencé à en appeler à un grand revirement d’approche du système partisan ?

Que faire aujourd’hui ?
Aujourd’hui, lorsque vous écoutez les discours, il se dit : « laissez les politiques s’occuper de la politique et vous société civile, occupez-vous de la société civile ». Il n’y a plus cette tolérance d’accepter en fait les critiques, pour que la société civile puisse contribuer à une amélioration du système. C’est pourquoi quand vous me demandez que faire, je me dis vous-même vous allez faire quoi de ce que je vous dirai du moment où la réception par ceux qui ont la capacité de faire bouger les lignes, par ceux qui ont mandat d’améliorer, c’est-à-dire de corriger le tir, leur perception est que la société civile ne devrait pas se mêler de ce qui ne la regarde pas. Du coup, on n’est plus motivé aujourd’hui à dire ce qui est possible ou ce qui pourrait améliorer les choses de façon substantielle. Mais, je vous dirai qu’il faut des assises entre tous les acteurs du cycle électoral. J’ai eu un grand regret par rapport au dialogue politique d’octobre 2019. Un tel dialogue aurait été l’occasion d’interpeller des institutions par rapport à leur pratique de la loi.
On est aujourd’hui à un carrefour où non seulement il faut espérer une relecture de la loi, mais beaucoup plus interpeller les institutions gardiennes de la loi, les institutions qui ont en charge le contrôle de la loi. Il faut vraiment les interpeller et trouver le moyen de faire le point avec elles, afin de savoir quelles sont les difficultés qui sont les leurs relativement à l’application effective de la loi. Quelles sont les difficultés qui sont les leurs relativement au contrôle de l’application de la loi. Il ne suffit plus de relever les problèmes liés à la réforme du système partisan et au cadre légal des élections. C’est important qu’avec ces institutions, on s’asseye et qu’on discute de façon technique du processus électoral.

Vous pensez notamment à un dialogue entre tous les acteurs ?
Un dialogue, ce n’est pas par rapport aux opposants parce qu’il ne faut pas mélanger ceux dont nous parlons là. Nous ne sommes pas en train de formuler la requête des opposants. Mais il s’agit de ce que tous les acteurs de la chaîne du cycle électoral se retrouvent : société civile, partis politiques, médias, Haac, Cour constitutionnelle, Cena, Cos-Lepi, Etat.
Il faut qu’on se retrouve pour discuter sur les différents aspects de conduite du processus électoral. Qu’est-ce qui est bien dans le contrôle, dans la sanction de la loi, et pourquoi ces choix. C’est-à-dire échanger sur le contenu de la loi au regard de notre expérience démocratique. Il ne sera pas question de juger et de préjuger de la bonne foi des gens. Donc, la discussion est importante de façon scientifique autour de panels bien pensés afin de dégager les pistes. Ce serait un peu osé de ma part, que déjà, on dégage les pistes sans avoir fondamentalement discuté techniquement et scientifiquement avec des acteurs qui ont aussi contribué au cycle électoral.

Propos recueillis par Moïse DOSSOUMOU