Un lieutenant à la barre, la salle d’audience toute ouie. Les procès verbaux disséqués page après page, l’accusé qui repond, ’’je l’ai dit et je le maintiens ’’. Les avocats…

Burkina : Lieutenant Relwindé Compaoré : Le déballage d’un commando RSP anti-putsch

Burkina : Lieutenant Relwindé Compaoré : Le déballage d’un commando RSP anti-putsch

Un lieutenant à la barre, la salle d’audience toute ouie. Les procès verbaux disséqués page après page, l’accusé qui repond, ’’je l’ai dit et je le maintiens ’’. Les avocats de la partie civile admiratifs, ’’j’ai pris du plaisir à l’écouter’’ confesse un auxiliaire de justice. Les dépositions se suivent, mais ne se ressemblent pas. Le Lieutenant Relwindé Compaoré a comparu ce 4 septembre 2018 dans le cadre du coup d’Etat. Dans un francais chatié et un calme olympien, il a dit sa part de vérité. Le coup d’Etat, il n’y était pas favorable, pour cela, il failli passer à la trappe par le touarègue et ses éléments, sa maison a été saccagée et pillée.

Revenu au mauvais moment. Ainsi pourrait-on résumer les circontances qui ont prévalu à la citation du Lieutenant Relwindé Compaoré dans le dossier du coup d’Etat de septembre 2015. Décoré 4 fois au Mali suite à des missions, le jeune officier née le 26 aout 1986 était en stage à Po en septembre 2015. Une fois le stage terminé, il se présente le 16 septembre au camp Naba Koom pour rendre compte à son chef de corps. Alors que l’officier regagne son domicile situé au conseil de l’entente, il reçoit un appel du Lieutenant Gorogo qui l’informe d’une rencontre de tous les officiers.

En réalité c’est le Général Gilbert Diendéré qui est initiateur de la réunion. En substance il fait savoir aux participants que la transition courrait à la dérive et que les élections ne se tiendraient pas. Par conséquent, il a préféré anticiper. Personne ne bronche.
Cette position du Général est-elle militaire ou politique, demande le ministère public. ’’C’est une position politique’ répond sans ambages le Lieutenant. Le règlement de l’armée autorise-t-il des prises de position politique ?revient le parquet. ’’Négatif’’, tranche l’accusé. La salle d’audience est toute ouïe.

Après, les sages, notamment l’ancien chef de l’Etat Jean Baptiste Ouagadougou, l’archevêque de Bobo, Paul Ouagadougou viennent en médiation. Dans la salle polyvalente de la présidence, ils font savoir essentiellement qu’il faut libérer les autorités de la transition. Selon le Lieutenant Relwindé Compaoré, certains participants ont opposé une fin de non recevoir à la requette.

L’officier regagne alors sa base au conseil de l’entente et y informe les hommes que le quartier est consigné. Ce qui veut dire que tout le monde doit rester sur place et ne doit obéir qu’aux ordres. Depuis son départ le 16 septembre de la présidence et du camp Naba Koom, le Lieutenant précise qu’il n’ est plus jamais retourné, jusqu’à ce jour.

Un contrôle de zone à la place de la nation

le 17 septembre, l’accusé à la barre dit avoir reçu l’ordre du Capitaine Zoumbri d’envoyer des hommes à la place de la nation parce qu’il y aurait des risques d’affrontement. Il s’agissait d’une mission de ’’contrôle de zone’’. Il a exécuté ledit ordre en y envoyant effectivement des hommes qui y sont restés les 18, 19 et 20 septembre. En tant que chef, il était tenu informer de tout ce qui se passait à la place de la nation. C’est ainsi qu’il a su que des contrôleurs de zone ont effectué des tirs en l’air. Pour cela, ils a été sermonné une fois de retour.

’’Quand on pose un acte, il faut l’assumer. Je ne cherche pas à protéger quelqu’un, même pas un subalterne’’ a répété le Lieutenant qui insiste pour dire qu’il est resté militaire durant toute la période du coup d’Etat. Raison pour laquelle il a exécuté des ordres en envoyant des hommes à la place de la nation et à la télévision nationale.

Mais, l’accusé a précisé qu’aucun des hommes qu’il a envoyés à la place de la nation ou à la télé n’a commis d’exactions. La preuve, à part les 4 chefs qui étaient au conseil de l’entente, aucun des 80 militaires qui étaient sous sa coupe à Charly Echo (nom de code du conseil de l’entente) n’est dans le box des accusés.

Les dérives, ce sont certainement les éléments du GUS(groupement des unités spéciales) du RSP qui en sont les auteurs, a révélé l’accusé devant les juges. A la barre, il a expliqué cette affirmation parce que selon les retours qu’ils a eus, ceux qui ont semé la désolation en ville circulaient en v8 et v6 couleur noire ’’banalisés’’, alors que c’est le GUS qui dispose de tels véhicules.

Un traite à abattre…

Une fois n’est pas coutume. Un accusé qui assume à la barre tout ce qu’il a dit lors des enquêtes devant le juge d’instruction, c’est rarement arrivé depuis le début du procès. Et pourtant, ce fut le cas avec le Lieutenant Relwindé Compaoré. Page après page, à la virgule près, suivant la lecture des procès verbaux avec son conseil Me Bama Dabou, il n’a rien réfuté. ’’ Je l’ai dit et je maintiens’’, a martelé le commando à plusieurs reprises. ’’Merci pour votre franchise’’, se contentera Alioune Zanré et ses hommes.

Ainsi, l’accusé a affirmé devant le juge que quand ses frères d’armes ont refusé de libérer les autorités de la transition à la demande des sages, il était ’’attristé’’ et a estimé que ces derniers en ’’faisaient trop’’.

Aussi, il n’a pas fait mystère de ce qu’il est resté en contact avec des militaires de certaines garnisons à qui ils donnaient des informations parce qu’il était contre ce qui se passait. Cette posture, quand le Sergent Chef Roger Koussoubé dit le ’’touarègue’’ et ses éléments l’ont sue, ils ont ’’cherché à m’abattre’’, a révélé l’officier. D’ailleurs, sa maison au conseil de l’entente a été saccagée et pillée. Il a appelé la gendarmerie pour constater.

Aussi, alors que le Chef d’état major général des armées a intimé l’ordre de réintégrer toutes les armes, il a été tenu en respect par quatre militaire au conseil de l’entente, alors qu’il s’affairaient à rendre les armes lourdes. Les soldats de première classe Bila Ibrahim, Dah Sansa, et le Caporal Yaguibou Robert l’ont encerclé et menacé, l’obligeant à battre en retraite.

’’Vous êtes un officier à respecter’’

Les avocats de la partie civile ont simplement été admiratifs de l’attitude du jeune officier. ’’J’ai pris du plaisir à vous écouter. Lieutenant, vous êtes un officier à respecter. Vous avez eu le courage de répéter des choses graves. Mois je vous félicite, votre attitude seule est apaisante’’ a dit Me Séraphin Somé. Toutefois, il a reconnu que cette attitude est susceptible d’exposer l’accusé, mais l’objectif du procès est justement la manifestation de la vérité et non d’envoyer un accusé forcément ’’au cachot’’.

Même son de cloche pour Me Prosper Farama qui a noté que le Lieutenant Relwindé Compaoré est l’un des rares accusés à assumer son procès verbal. ’’ On est soulagés d’entendre certains propos’’ a pousuivi l’avocat de la partie civile.

’’Je suis convaincu que des gens me voient comme un traite, mais pour moi ce qui prime, c’est la manifestation de la vérité’’ avait expliqué l’accusé qui avant de rejoindre sa place, a souhaité prompt rétablissement aux blessés et paix aux âmes de ceux qui sont morts suite aux événements.

Tiga Cheick Sawadogo

Lefaso.net